Petite visite chez les Eberhards...

Les gardes du corps des Eberhard s'avancèrent vers Konrad. Ils reconnurent immédiatement le personnage et s'arrangèrent pour le faire venir devant Gustave.

Le bureau du chef de famille était rempli d'une fumée blanche opaque qui témoignait de l'importante activité illicite qu'avait l'habitude de pratiquer ce dernier.

L'opium était cependant le seul vice que l'on pouvait reprocher à Gustave Eberhard. Il n'avait jamais tromper sa femme et ne buvait que rarement de l'alcool. Quand à la déferlante des nouvelles drogues, à part les vendre, il n'y touchait jamais.

Ses sbires apportèrent Konrad devant lui.
Le chef de famille éteignit sa pipe et s'avança vers l'homme.
Gustave Eberhard n'était en soi pas très imposant physiquement, mais il se dégageait de lui un tel charisme qu'il en devenait facilement impressionnant. Un tel homme venu du milieu ouvrier qui s'était retrouvé propulsé à un tel niveau forçait néanmoins le respect.

- Dites moi si je me trompe, annonça-t-il, vous êtes le frère de notre bien aimé homme du pouvoir actuel (il insista beaucoup sur actuel), j'imagine que je n'ai pas besoin de me présenter…

Il ne laissa pas le temps à l'homme de répondre et fit un signe à ses sbires les ordonnant de les laisser seuls. Un unique garde resta présent devant la porte, l'arme au poing.
Il sortit alors une bouteille de whisky avec deux verres.

- Je vous prie d'excuser l'accueil froid mais ici nous nous méfions de tout le monde. J'ai eu vent de votre petit décret… C'est pourquoi je ne suis guère surpris de vous voir débarquer dans la région… Même si je dois bien admettre que vous êtes courageux. Après tout vous auriez pu vous faire descendre à l'entrée… Ou même dans le couloir par un de mes fils drogué… qui Sait?

Il se mit à rire d'une façon névrosé puis tendit le verre plein à son convive.

- Ne vous inquiétez pas, ce n'est pas empoisonné… voyez vous ce ne serait pas dans mes intérêts de vous tuer… Du moins pour le moment… Je vais être honnête avec vous, je suis un opportuniste, et de ce fait peu fidèle à celui qui me laisse pratiquer mes activité librement du moment qu'il le fait. Le pouvoir change et je reste en place. Qui dirige m'importe peu du moment que l'on peut s'entendre si vous voyez ou je veux en venir.

Il s'arrêta un instant toisant la réaction de l'homme puis continua.

- Je suis persuadé que mettre nos activités en communs seraient très productif pour nos deux parties. Cependant j'ai du mal à cerner ce que désire votre frère… Il traque mes frères de la pègre à Lagen et vient pour faire affaire avec moi… Cela a tendance à me gêner un tant soit peu. Vous devez bien avouer que c'est une attitude très contradictoire... Pourquoi vouloir faire affaire avec nous maintenant? Je vais aller droit au but. Mes alliances avec les autres secteurs de la pègre sont bien trop fortes et rentables pour que j'y mette un terme. Si vous voulez que l'on fasse vraiment affaire, il va falloir arrêter d'ennuyer mes amis voleurs et tueur à gage. Surtout que croyez moi ils pourraient vous être très utile et les traquer ne fera que vous les mettre à dos. Et ça, faites moi confiance vous n'en n'avez pas envi. Que répondez vous à cela?

Konrad était un homme très courageux parce qu'il appréciait se mettre en danger et repousser ses limites.
Lorsque son frère, le bien-aimé président, lui avait demandé de remplir une mission de rapprochement avec la mafia, il ne s'était pas juste contenté d'accepter, pire, il a même insisté pour se déplacer seul sans escorte à Cazialstava, risquant sans doute mille risques et périls.

Il avait écouté de manière attentive les propos de Gustave Eberhards et préparait déjà la réponse aux questions qu'il posait. Il était inutile de s'étonner au sujet des interrogations que le parrain avait sur les arrestations aux faubourgs extérieurs...

- Mon frère, même s'il donne une image de lui brutale et écervelée, est très rusé et je vais aussi faire preuve de franchise avec vous, tous ses actes sont calculés et beaucoup au jour d'aujourd'hui ne se rendent même pas compte de sa capacité à anticiper les choses et à se mettre à jour.
Auriez-vous un seul instant cru qu'un simple général de brigade puisse être nommé Commandeur puis prendre le pouvoir ?
Le pire dans tous cela, c'est qu'il a réussi à rester chef d'État jusqu'à maintenant et ce, malgré tous les risques auquel il était confronté !
Il suffit de se rappeler des attaques rebelles, de l'opposition libérale et pire, de l'ImperialStirn qu'il a pu manipuler à sa guise !
Même le pouvoir religieux s'était retourné contre lui et voyez maintenant la situation : Mis à part les vampires, les bourgeois-entrepreneurs et moi-même, personne dans cette République de l'Union-Sacrée ne peut réussir à le démettre de ses fonctions, et vous noterez avec aisance d'ailleurs que les potentiels prétendants qu'il reste n'aspirent qu'au gain du profit et n'ont pas de réelles ambitions politiques !
Il y a peu, tout le monde se retournerait contre lui pour l'écraser, aujourd'hui il les a tous écrasés. Avouez que cela ressemble fort à une histoire de mafias n'est-ce pas ?

Il sortit de la poche de son veston un peu de tabac, puis après avoir allumé au feu ce dernier, observa les traits de son interlocuteur.

- Si mon frère a procédé aux arrestations du faubourg extérieur, ça n'est en rien une manœuvre sécuritaire de déstabilisation ou une procédure irréfléchie et absurde. Retenez bien qu'il reste avant tout chef de l'État et son monde à lui, c'est la politique.
Contrairement aux organisations mafieuses, il ne peut pas se contenter d'une image de malfrat, si ce n'est de tyran et doit en permanence s'assurer du soutien populaire, c'est pourquoi des exercices vertueux et des revendications politiquement correctes doivent avoir lieues pour assurer la stabilité du régime. Un État ne se gouverne pas en claquement de doigts. Ce le fut sans doute du temps des Empereurs, maintenant la donne est nouvelle.
Pour vous répondre de manière concrète, les arrestations qui se sont déclarées ne sont là que pour signifier l'existence de l'État et pour éviter les débordements ostentatoires.
Si vos partenaires souhaitent commercer, alors qu'ils le fassent avec plus de discrétion et de tenue parce que l'État reste obligé de maintenir l'ordre public ou un semblant de celui ci. Mais rassurez vous, les plus éminents de vos partenaires seront amnistiés.
Souhaitez-vous qu'en en vienne aux choses plus sérieuses maintenant ?

Gustave écoutait attentivement Konrad en sirotant son verre d'alcool.
Pendant un instant, il se demanda si l'image d'une brute alcoolique et écervelée que renvoyait Shultz était aussi ce que les gens pensait de lui... Ces enfants peut être mais lui... Dans le fond, ce brave Gustave n'avait jamais vraiment sombré dans les dérives de l'époque si l'on omettait sa petite organisation bien sur. Il reprit ses esprits et se tourna vers son convive.

- Vous savez, reprit-il, rien de m'étonne de nos jours, c'est votre frère qui est au pouvoir mais demain ça pourrait être quelqu'un d'autre, tout comme cela pourrait aussi durer jusqu'à la fin de ses jours... La politique du S-H est tellement volatile. Regardez moi, si il y a 30 ans, j'avais clamé haut et fort que je deviendrai un chef de la mafia respecté, on m'aura rit au nez. Tout est une question de chance au fond... Et peut être de destin.
Quand aux arrestations de Noël, ce n'est pas vraiment là ou je voulais en venir... La pègre de Kapen Lagen ne s'arrête pas au prostituées et malfrats des basses rues... Eux ne font même pas partie du manège du crime. Mes informateurs et ceux de mes confrères ont ouï dire que vous vouliez nuire à de bien plus gros poissons, je veux bien sur parler de la guilde des voleurs, notre meilleur allié. Je ne suis certes pas marié avec eux, mais si vous les oppressez, dans cette affaire je ne pourrais pas vous aider. Leur contrôle s'exerce sur bien plus de territoires que moi, et même si mon activité est un peu différente de la leur, si jamais il ont choisi de vous nuire, je ne pourrais que les laisser faire, si ce n'est les appuyer par la suite. Sachez que la pègre est très liée même si nos objectifs sont différents

Il se tut quelques minutes toujours en observant le visage impassible de son hôte. Cet homme était clairement quelqu'un de louable pour venir jusque devant Gustave sans montrer le moindre signe de peur ou de faiblesse, et cela le chef de famille appréciait beaucoup.


- Je tenais simplement à vous prévenir, ce sont mes conditions, faites ce que vous voulez avec les petits malfrats de bas étages, mais le gros gibier laissez les en paix. Après, vous m'ouvrez clairement les bras, et de ce fait je ne peux pas vraiment refusé. Je vous en prie, passons donc à "vos choses sérieuses"...